actualité technique CTMNC Eurocode 6 DTU 20.1 construction maçonnerie pierre massive mieux comprendre le contexte normatif relatif à la maçonnerie en pierre naturelle Olivier Chèze, CTMNC Ce document vous propose de mieux comprendre le contexte normatif relatif à la maçonnerie en pierre massive. Proposée par le CTMNC, il fait un point sur les changements engagés depuis 20 ans dans les textes français, après l’établissement du marché unique européen et l’introduction des normes de portée européenne. Une première révision du NF DTU 20.1, le texte de référence des maçonneries traditionnelles en France, a eu lieu il y a quelques années après l’obligation en 2007 du marquage CE sur les éléments de construction. Une deuxième révision est actuellement en cours : elle vise pour l’essentiel à introduire les Eurocodes. Qu’est-ce qu’un Eurocode ? Pourquoi changer nos règles de dimensionnement ? Pour quels changements ? C’est à ces questions que nous tenterons de répondre, le plus simplement possible. A - L’arrivée de l’Eurocode 6 dans le NF DTU 20.1 LE CONTEXTE NORMATIF ACTUEL DE LA MAÇONNERIE EN FRANCE En France, une part importante des règles de l’art du bâtiment est régie par un ensemble de textes appelés NF DTU, pour Document Technique Unifié. Les NF DTU sont des documents qui contiennent les spécifications techniques relatives à l'exécution des travaux de bâtiment. Ils sont reconnus et approuvés par les professionnels de la construction. Les NF DTU sont des textes normatifs qui constituent une référence commune pour tous les intervenants du bâtiment : maître d’ouvrage, maître Les normes européennes sur la maçonnerie. NF DTU 20.1 d’œuvre, entreprises, artisans, contrôleurs techniques, ou encore experts des assurances et des tribunaux. Les NF DTU sont composés d’au moins trois parties. Ils préconisent le bon choix de produits dans le CGM (cahiers des Critères Généraux de choix des Matériaux). Ils décrivent les étapes de mise en œuvre des ouvrages dans le CCT (Cahier des Clauses Techniques types). Enfin ils définissent les clauses administratives spéciales aux marchés privés dans le CCS (Cahier des Clauses administratives Spéciales). L’application des NF DTU est volontaire et résulte d'un accord passé entre les parties intéressées, lui conférant ainsi un caractère contractuel. Il en découle que les NF DTU ne peuvent être considérés ni comme réglementaires, ni «de facto» obligatoires. Les règles de conception et d’exécution relatives aux parois et murs en maçonnerie de petits éléments sont énoncées dans le NF DTU 20., dont la première édition date des années 1960. Il regroupe les éléments de construction traditionnellement utilisés en France : la brique, le bloc béton, et la pierre naturelle. Il a récemment fait l’objet d’une révision ; la dernière édition date d’octobre 2008. L’objectif était de le mettre en accord avec le contexte normatif européen, notamment le marquage CE des produits de construction devenu obligatoire par un arrêté publié en 2007. LE CONTEXTE NORMATIF ACTUEL DE LA MAÇONNERIE EN EUROPE L’union économique, mise en place progressivement au sein de l’Union Européenne, s’est construite autour d’un objectif, celui de la libre circulation des marchandises, des biens et des capitaux dans un marché commun. Cette union a pour but l’extension des débouchés des entreprises européennes et le développement de la concurrence, de la compétitivité et de l’innovation. L’ensemble des critères nécessaires à l’établissement d’un langage commun dans l’Union Européenne a pris la forme de normes applicables par l’ensemble des pays. Le principal objectif de cette normalisation européenne est la définition de prescriptions techniques ou qualitatives volontaires auxquelles des produits ou des procédés de fabrication peuvent se conformer. Il existe par exemple des normes relatives aux produits ou aux matériaux, des normes pour les méthodes d’essai, des normes de conception et de calculs, etc. Pour les éléments de maçonnerie, on peut citer la série de normes NF EN 771, dont la NF EN 771-6 relative à l’élément en pierre naturelle. Il existe également la série de normes NF EN 998, relative aux spécifications des mortiers de montage. La série NF EN 772 traite quant à elle des méthodes d’essai. Par exemple, la NF EN 772-1 est utilisée pour la détermination de la résistance à la compression, la NF EN 772-11 pour la mesure de l’absorption d’eau par capillarité. Les normes européennes relatives aux produits servent également de socle au marquage CE. Un élément de maçonnerie «marqué CE» n’est ni plus ni moins qu’un produit pour lequel le fabricant atteste qu’il satisfait aux exigences essentielles. Il doit déclarer dans la documentation accompagnant le produit les propriétés conformes aux exigences listées dans la partie harmonisée (annexe ZA) de la série de normes NF EN 771. C’est au marquage CE que les bureaux d’études se référeront pour la connaissance des résistances mécaniques utiles au dimensionnement des ouvrages. INTRODUCTION AUX EUROCODES Les Eurocodes sont des normes de conception et de calculs. Entamé au milieu des années 1970, leur élaboration aura été un long chantier. Comme pour les normes européennes, les Eurocodes ont pour objectif d’harmoniser cette fois-ci, non pas les spécifications de produits, mais les règles de conception et de calculs. Les Eurocodes apportent ainsi une plus grande cohérence des règles de dimensionnement des ouvrages, quels que soient les matériaux employés. Déclinés sous la forme de dix cahiers accompagnés chacun d’une annexe nationale, ils ont été élaborés par des groupes de travail regroupant des experts de tous les pays de l’Union Européenne. Ils traitent aussi bien des structures en béton ou en acier que celles en bois ou en aluminium. On y trouve un ensemble de principes et de Organisation des Eurocodes. règles de justifications des structures de bâtiment ou d’ouvrages de génie civil. Ils sont reconnus par tous les Etats membres de l’Union Européenne comme base de spécification des contrats pour les travaux de construction. En quoi cela concerne-t-il la maçonnerie ? C’est qu’il existe un cahier parmi ces Eurocodes qui traite des maçonneries. Il s’agit de la NF EN 1996, appelé aussi Eurocode 6. Autrement dit, son domaine d’application est le même que le texte normatif que l’on connaît et que l’on applique en France, le NF DTU 20.1, sans toutefois le recouvrir complètement (le NF DTU est avant tout une norme d’exécution et de mise en œuvre). Ce problème n’est pas spécifique au seul domaine de la maçonnerie : la France utilisait les normes bien avant de se concerter avec ses voisins européens ! Il existe ainsi des correspondances entre la plupart des textes nationaux et les normes européennes, y compris les Eurocodes. En vertu des accords passés entre les Etats membres et les instances de normalisation, les normes européennes sont obligatoirement reprises au niveau national. Il a donc fallu créer une période de coexistence, le temps d’une part que l’ensemble des normes européennes ait pu être rédigé, d’autre part que l’ensemble des contradictions avec les textes nationaux ait pu être identifié et corrigé, soit en retirant le texte national, soit en le modifiant. Cette période de coexistence s’achève, et des actions sont menées pour effacer les dernières incohérences entre les textes… LES IMPACTS DE LA NORMALISATION EUROPEENNE SUR LES NF DTU (EN PARTICULIER LE NF DTU 20.1) Dans ce contexte, les Ministères de l’Equipement et de l’Emploi ont engagé en 2004 une action nationale spécifique (appelée Plan Europe), soutenue par des financements publics et coordonnée par le CSTB. Cette action a permis aux différentes filières de la construction d’entreprendre une réactualisation de leurs NF DTU respectifs, dans le cadre de ce que l’on appelle la procédure «INEA» (pour Intégration des Normes Européennes et des Agréments Techniques). La procédure «INEA» a pour objectif la prise en compte des nouveaux référentiels produits européens dans les NF DTU. Elle vise à préparer la transition entre les règles actuelles et la mise en application des Eurocodes. Des experts sont désignés pour chaque dossier. Ils remettent une proposition de réactualisation au CSTB qui l’analyse puis la transmet au bureau de normalisation en charge du NF DTU concerné. La révision peut alors démarrer. Les travaux de révision du NF DTU 20.1 ont débuté mi-2012 et devraient se terminer courant 2013. Cette nouvelle révision, engagée après celle de 2008, verra donc l’introduction de nouvelles règles de conception conformes aux Eurocodes. B - Introduction aux méthodes de vérification de l’Eurocode 6 Ce second chapitre présente les principales notions qui ont été développées dans la norme de conception des maçonneries, l’Eurocode 6. Ces notions seront sans doute reprises tout ou partie dans le DTU 20.1, actuellement en cours de révision pour intégrer les méthodes de dimensionnement de cette norme européenne. Le propos se concentre volontairement sur l’explication des nouveaux concepts plutôt que sur les formules de calcul. LE NF DTU 20.1 ACTUEL L’approche française de la conception des bâtiments en maçonnerie avec le DTU 20.1 était jusqu’à présent principalement axée sur la mise en œuvre, le choix des matériaux et le respect de règles très simples de dimensionnement. Cette vision de la maçonnerie s’appuyant pour l’essentiel sur l’expérience était appropriée pour les constructions courantes comme les maisons individuelles et bâtiments assimilés. Mais l’actualité réglementaire a changé la donne : étant donné la reformulation en cours de la réglementation sismique, il faut doter la maçonnerie de véritables règles de dimensionnement. Seule la partie 4 «Règles de calcul et dispositions constructives minimales» du DTU 20.1 verra son contenu modifié par l’introduction de l’Eurocode 6. Cela signifie que l’essentiel des recommandations existantes du DTU, en termes de mise en œuvre, de choix des matériaux, ou de techniques d’exécution, restera valable. Celles-ci influeront sur les valeurs de certains paramètres de calcul (comme la classe de mortier qui est fonction de la dureté de la pierre). Selon le DTU 20.1, la contrainte de compression admissible s’obtient en divisant la résistance nominale à la compression de la pierre naturelle par un coefficient «NDTU» appelé coefficient global de réduction. Par exemple, pour un chargement centré, le coefficient global de réduction «NDTU» est égal à 8. Une pierre de résistance 20 MPa possède donc selon cette formule une contrainte admissible de 2,5 MPa. Cette règle de calcul très simple avait l’avantage d’être valable pour plusieurs types de sollicita- Groupe 1 Eléments pleins Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Eléments constitués d’alvéoles verticales Eléments constitués d’alvéoles horizontales Les groupes d’éléments de l’Eurocode 6 tions, moyennant une pondération selon l’excentrement de la charge ou l’élancement du mur. Par contre, cela aboutissait à des niveaux de sécurité hétérogènes entre les éléments de maçonnerie. LES NOUVELLES NOTIONS DE L’EUROCODE 6 Le calcul aux étas limites La méthode de calcul donnée dans le DTU 20.1 est de type calcul aux contraintes admissibles, basé sur l’application d’un coefficient de sécurité global tenant compte à la fois des incertitudes sur des actions et des résistances des matériaux. Cette approche est à distinguer de celle dite du calcul aux états limites pour laquelle on introduit des pondérations d’actions et de résistances évaluées à partir de concepts semi-probabilistes. Ces pondérations s’appliquent à des valeurs dites caractéristiques (définies plus loin), calculées selon une probabilité très faible qu’a l’élément de ne pas atteindre cette valeur. Cette approche est celle de l’Eurocode 6. Les groupes d’élément Au regard de la grande diversité des éléments de maçonneries, l’Eurocode 6 établit un classement en quatre groupes distincts qui se base sur la géométrie de leurs éventuels évidements (voir le tableau 1 ci-dessus). La pierre, en tant qu’élément plein, fait partie du groupe n°1. Les groupes n°2, n°3 et n°4 concernent les éléments creux. Ce classement renvoie à différentes formules de calcul et valeurs selon les groupes pour les résistances caractéristiques des maçonneries. éléments dont la résistance à la compression est déclarée avec une probabilité de 5 % de ne pas atteindre cette valeur séchée à l’air ambiant, cela équivaut à un «niveau de confiance» de 95 %. Par comparaison, la valeur minimale attendue «Emin», utilisée pour la résistance à la flexion des pierres en voirie par exemple, est définie pour un niveau de confiance de 75 % ; - la deuxième catégorie (catégorie II) concerne tous les autres éléments. La distinction entre les deux catégories a des répercussions sur la valeur du coefficient partiel de matériau «γM» utilisé pour la détermination de la résistance de calcul (définie plus loin). Le niveau d’exigence étant plus faible pour les éléments de la catégorie II, il sera compensé par une valeur du coefficient «γM» plus élevée. Le fabricant est tenu de déclarer la catégorie de l’élément dans le marquage CE. La résistance des pierres est de catégorie II (sauf à établir un système d’attestation de type CE2+ qui impose un contrôle par un organisme notifié comme le CTMNC). Généralement, c’est la résistance à la compression moyenne qui est utilisée dans la déclaration des performances. La résistance en compression normalisée de la pierre La résistance à la compression que l’on mesure au cours d’un essai dépend de plusieurs facteurs qui interfèrent sur la valeur finale : dimensions de Résistance moyenne de la pierre La catégorie déclarée Il existe deux catégories d’élément : - la première catégorie (catégorie I) regroupe les Coefficients de passage Groupe d’élément (N°1 pour la pierre) Résistance normalisée Résistance du mortier Résistance caractéristique à la compression Catégorie déclarée (II pour la pierre) Niveau contrôle qualité sur chantier Coefficient partiel de matériau «γM» Résistance de calcul à la compression Extrait de la page de garde de l’Eurocode 6 (2006). Obtention de la résistance caractéristique à la compression d’une maçonnerie. l’éprouvette, frettage, teneur en eau du matériau, etc. Un même matériau pourra donc avoir des résistances à la compression différentes en fonction de ces paramètres. Il peut y avoir là une contradiction que l’Eurocode 6 corrige en introduisant une valeur «standardisée» à l’ensemble des éléments de maçonnerie : la résistance moyenne normalisée. C’est la valeur de référence qui servira pour le calcul de la résistance caractéristique de la maçonnerie (voir plus loin). La résistance en compression normalisée est, par définition, la résistance moyenne à la compression d’une éprouvette de dimensions 10 x 10 x 10 cm séchée à l’air ambiant. Dans le cas d’éprouvettes de pierre de dimensions différentes et/ou séchées en étuve, elle est obtenue en convertissant la résistance à la compression mesurée en laboratoire à l’aide de coefficients de passage définis dans la norme EN 772-1. Les résistances caractéristiques de la maçonnerie Par définition, la résistance caractéristique d’une maçonnerie est «la valeur de la résistance de la maçonnerie dont la probabilité de ne pas être atteinte est de 5 % dans une série d’essais supposée (par hypothèse) illimitée». Par comparaison, une résistance moyenne, utilisée jusque-là dans le DTU 20.1, a une probabilité de 50 % de ne pas être atteinte. Des valeurs forfaitaires sont proposées pour les résistances caractéristiques à la flexion et au cisaillement des maçonneries. La résistance caractéristique à la compression doit quant à elle être calculée à partir d’une formule qui tient compte des valeurs de résistances moyennes à la fois de la pierre (résistance harmonisée) et du mortier utilisés. Il est également possible de déterminer la résistance caractéristique d’une maçonnerie par des essais en laboratoire. Il reste à obtenir la résistance de calcul en divisant la résistance caractéristique par un coefficient partiel de matériau «γM» qui est fonction du niveau de contrôle de la qualité d’exécution sur le chantier et de la catégorie de l’élément. C’est cette résistance de calcul qui comme son nom l’indique intervient dans les calculs de vérification et qui peut être comparée à la contrainte admissible du DTU actuel. L’exigence de sécurité est significativement augmentée par l’introduction de la résistance caractéristique. Concrètement, cela se traduit par des valeurs de résistance de calcul plus faibles que les contraintes admissibles calculées selon l’actuel DTU 20.1. Par exemple, en reprenant l’exemple précédent d’une pierre avec une contrainte admissible de 2,5 MPa, la résistance de calcul à la compression d’après l’Eurocode 6 vaut 1,8 MPa. Quelles vérifications pour quelles actions ? Comme avec le DTU 20.1 existant, le principe de dimensionnement d’une maçonnerie selon l’Euro- Compression Flexion Cisaillement Chargements appliqués sur les murs (d’après «Dimensionner les ouvrages en maçonnerie», M.Hurez, N.Juraszek, M.Pelcé, Afnor - Eyrolles Editions, 2009) code 6 consiste à vérifier que la charge appliquée est inférieure ou égale à la résistance de calcul de la maçonnerie vue précédemment. Cette condition devra être vérifiée pour les murs soumis à des charges de compression (sous l’effet du poids propre ou des charges d’exploitation), de cisaillement (pour les murs de refend), de flexion (sous l’effet du vent, du séisme), ou à une combinaison de ces trois chargements. Un exemple de calcul sera traité dans le dernier article de cette série consacrée au contexte normatif relatif à la maçonnerie en pierre naturelle. Le calcul analytique d’un cas simple y sera détaillé puis les résultats seront comparés avec ceux obtenus par l’outil informatisé d’aide au dimensionnement développé par le CTMNC, «Dimapierre-6» (téléchargeable librement sur www.ctmnc.fr). L’EC 6 UN NOUVEAU TEXTE DE RÉFÉRENCE… Les nouveaux concepts de l’Eurocode 6 prennent le pas sur les méthodes françaises de dimensionnement des maçonneries. Ils constituent à n’en pas douter une étape à préparer pour toutes celles et ceux qui travaillent en rapport avec le sujet : les bureaux d’études bien sûr, mais aussi les fournisseurs de matériaux qui devront s’approprier les notions de résistance moyenne normalisée ou de catégorie, les prescripteurs qui devront connaître les exigences minimales, les poseurs qui devront revoir certaines habitudes constructives… L’arrivée de l’Eurocode 6 ne devrait pas bouleverser pour autant les pratiques actuelles hors zones sismiques. Il deviendra par contre une norme à connaître pour le dimensionnement en zones sismiques : l’Eurocode 6 constitue en effet un des textes de référence de l’Eurocode 8 d’application obligatoire selon les modalités de l’arrêté du 25 octobre 2012. La publication du DTU 20.1 révisé est prévue en 2013. C - Quelques cas pratiques avec le logiciel DIMAPIERRE-6 Cette troisième et dernière partie propose d’illustrer par un exemple simple le dimensionnement de murs de maçonnerie en pierre naturelle. LORS D’UN NOUVEAU PROJET, QUE FAUT-IL VÉRIFIER ET COMMENT ? Les méthodes de calcul proposées par l’Eurocode 6 ne vérifient pas la stabilité d’un bâtiment à proprement parler mais la stabilité de chacun des murs structurels qui le composent. On entend par mur structurel un mur qui participe à la reprise des efforts agissant sur le bâtiment, qu’ils soient d’origine gravitaire (comme le poids des personnes, des meubles, des murs euxmêmes…) ou climatiques (le vent ou la neige par exemple). Il y a donc autant de vérifications qu’il y a de murs à vérifier. Selon le type de murs (murs de façade, murs de contreventement, murs de soubassement…), les efforts à prendre en compte ne sont pas les mêmes. Il faut donc choisir la méthode de vérification en fonction de la «fonction» du mur. Les murs de façade sont principalement soumis à un chargement vertical. Les murs de contreventement doivent être vérifiés au cisaillement. Les murs de soubassement sont eux soumis à un chargement latéral dû à la poussée des terres, etc. EXEMPLE DE DIMENSIONNEMENT On se propose d’étudier le cas d’un immeuble à appartements de cinq niveaux construits en pierre naturelle dans la ville de Lyon (voir Fig. 1). La pierre utilisée est un calcaire tendre (masse volumique = 1600 kg/m3) de résistance en compression normalisée 15 MPa (donc mesurée sur des cubes de côté 10 cm, séchés à l’air ambiant). Les murs ont une épaisseur de 25 cm. On ne vérifiera ici que le chargement vertical, généralement prépondérant vis-à-vis des autres chargements. On commence par déterminer la résistance des murs «NRd». - 1ère étape : on commence par calculer la résistance caractéristique en compression du mur. Le mortier utilisé est un mortier de classe M5 (5 MPa). On utilise la formule fournie par l’Eurocode 6 pour la pierre naturelle : fk = 0,45 x 150,7 x 50,3 = 4,85 MPa Cette valeur doit ensuite être divisée par un coefficient partiel des matériaux «γΜ» (voir article précédent), ici égal à 2,8. Cette valeur correspond à un niveau de contrôle IL2. En effet, un bureau de contrôle est obligatoirement présent puisque la hauteur du dernier niveau est supérieure à 8 m et que l’on se situe en zone sismique II (ce qui est le cas de la ville de Lyon). On obtient ainsi la résistance de calcul en compression «fd», valant 1,73 MPa. Schéma de l’immeuble de 5 niveaux utilisé pour le calcul des performances mécaniques de la pierre. - 2ème étape : on détermine la charge de résistance «NRd». Celle-ci s’obtient par le produit de «fd» par la section horizontale du mur, qu’il faut également multiplier par un facteur de réduction «φ» tenant compte de l’excentricité et de l’élancement. NRd = φi (ou φm) x t x fd Il faut contrôler à la fois la section en tête (ou en pied) de mur, en plus de la section à mi-hauteur. Il s’agit donc de calculer deux valeurs pour le facteur de réduction, « φi » et «φm» respectivement. Dans notre exemple, avec les hypothèses suivantes : - les murs sont soutenus des deux côtés horizontaux et des deux côtés verticaux, - l’excentricité due au vent vaut 5 mm, - l’excentricité des charges de plancher (hourdis) vaut 20 mm. On trouve φi = 0,76 et φm = 0,68. La valeur de calcul de la résistance du mur dans l’état limite extrême «NRd» sera alors la plus petite valeur calculée. Ici : NRd = φm x t x fd = 294 kN/ml, soit 29,4 T/ml - 3ème étape : on compare les descentes de charge avec la résistance des murs de l’immeuble. Elles sont maximales pour le mur central dans notre exemple (voir Fig. 1). Il faut veiller à pondérer les charges à l’état limite ultime d’un coefficient de 1,35 pour les charges dites «permanentes» (poids propre des éléments) et d’un coefficient de 1,5 pour les charges d’exploitation (se référer l’Eurocode 1-1 pour les valeurs caractéristiques). Pour les charges de neige, il est en plus demandé de prendre en compte un coefficient d’accompagnement valant 0,5 pour une alti- tude H inférieure ou égale à 1 000 m. Pour le mur central, les descentes de charge se décomposent de la manière suivante : - Poids propre des planchers (hourdis avec chape) : 1,35 x 450 = 608 kg/m² - Charges d’exploitation sur les planchers : 1,5 x 250 = 375 kg/m² - Poids propre de la toiture : 1,35 x 100 = 135 kg/m² - Charges de neige sur la toiture : 1,5 x 0,5 x 55 = 42 kg/m² (zone B2, H = 200 m) - Poids propre d’un mur supérieur : 1,35 x 0,25 x 2,6 x 1600 kg/ml Pour une portée de plancher de 5,5 m, la descente de charge «NSd» sur le mur central en rezde-chaussée, qui supporte les charges de quatre niveaux et la toiture, vaut : NSd = 5,5 x (0,608 x 4 + 0,375 x 4 + 0,135 + 0,042) + 4 x 1,4 = 28,2 T/ml On vérifie bien que la résistance du mur est supérieure à la descente de charge : NSd = 28,2 T/ml < NRd = 29,4 T/ml On peut donc conclure que les blocs de pierre naturelle en calcaire tendre ont une portance suffisante pour reprendre les descentes de charge de cet immeuble de cinq niveaux. UN POINT SUR LES CHAÎNAGES Hors zones sismiques, et contrairement aux pratiques actuelles, les chaînages verticaux en béton armé ne sont pas nécessaires pour les maçonneries en pierre naturelle. C’est d’ailleurs une de ses spécificités bien détaillée dans le DTU 20.1 (article 3.1.2, Partie 4). En général, les chaînages verticaux d’une maçonnerie empêchent que celle-ci ne puisse un jour se disloquer et s’opposent au soulèvement des planchers. Mais il est reconnu que le poids des murs en pierre massive suffit à supprimer ces risques. En zones sismiques, le poids des pierres joue également favorablement sur la tenue du mur de maçonnerie, dans une certaine limite. En effet, en-dessous d’une valeur d’accélération sismique, et sous certaines conditions comme une épaisseur minimale de paroi, les maçonneries en pierre naturelle n’ont théoriquement pas besoin d’inclure de chaînages verticaux. CONCLUSIONS Les blocs de pierre naturelle ont l’avantage d’être pleins, et d’être utilisés avec des épaisseurs suffisantes qui permettent de reprendre des efforts importants. On a vu dans l’exemple précédent que des blocs de pierre en calcaire tendre convenaient pour construire la totalité des murs porteurs d’un immeuble à appartements de cinq niveaux. Les caractéristiques mécaniques de la pierre en font un matériau de construction naturel performant. Et contrairement aux idées reçues, les chaînages verticaux en béton armé ne sont pas toujours nécessaires pour les bâtiments en pierre massive. Dans la majorité des cas, l’épaisseur d’une paroi d’un bâtiment ne sera pas seulement dimensionnée par la descente de charge mais aussi et surtout par les exigences thermiques de la réglementation «RT 2012». La pierre ne possédant qu’une faible résistance thermique, il faudra prévoir une bonne isolation incorporée au bâti. POUR ALLER PLUS LOIN... Pour celles et ceux qui souhaiteraient en connaître davantage sans trop rentrer dans le détail, il existe dans l’Eurocode 6 une partie présentant des méthodes simplifiées qui rendent plus facile l’étude de petits bâtiments comme des maisons individuelles Extraits du manuel d’utilisation du logiciel «Dimapierre-6» Il permet d’automatiser les calculs à partir des valeurs des charges, des dimensions et des caractéristiques du mur. Il s’accompagne d’un manuel d’utilisation qui détaille son fonctionnement et où sont présentés d’autres exemples simples. Un nouveau module, «Dimapierre-8», intégrera les exigences sismiques de l’Eurocode 8 en plus de celles de l’Eurocode 6. Sa sortie est prévue au cours du 2ème semestre 2013. Extraits du manuel d’utilisation du logiciel «Dimapierre-6» Siège social : 17, rue Letellier - 75015 Paris - Tél : 01 44 37 50 00 - [email protected] Services techniques : 200, avenue du général de Gaulle - 92140 Clamart - www.ctmnc.fr Ce document a été réalisé à partir de trois articles publiés dans la revue Pierre Actual n°910, n°911 et n°912. ou des petits collectifs. Il s’agit de la norme NF EN 1996-3. Il existe également dans le commerce plusieurs guides, édités par le CSTB ou l’AFNOR par exemple, qui reprennent et expliquent les dispositions de la norme. Enfin, le CTMNC propose un logiciel de calcul des murs de maçonnerie en pierre naturelle selon l’Eurocode 6. Il s’intitule «DIMAPIERRE-6» et peut être librement téléchargé sur le site www.ctmnc.fr. ">

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